Berlin - Doses trop peu nombreuses, difficultés de stockage, pesanteurs administratives, méfiance de la population: le déploiement de la vaccination contre le Covid-19 bute dans le monde entier sur plusieurs obstacles.

. Des doses encore insuffisantes

La production de doses de vaccins peine à suivre le rythme de leur conception et autorisation en un temps record.Faute de stocks suffisants, de grands centres de vaccination, à Berlin ou New York, ont tardé à ouvrir leurs portes. D'autres n'ont toujours pas été inaugurés.

A New York, un million de doses ont été livrées, pour 4 millions de personnes répondant aux critères de vaccination.

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Schéma sur l'acheminement des vaccins contre le coronavirus de Pfizer et Moderna en fonction de leur mode de conservation 

Sous pression, l'Union européenne a doublé ses précommandes du vaccin Pfizer-BioNTech et les premières doses de celui de Moderna ont été livrées, alors qu'un troisième vaccin pourrait être autorisé fin janvier. Quelque 600 millions de doses devraient être disponibles dans les prochains mois.

L'allemand BioNTech promet de fournir 2 milliards de doses d'ici la fin de l'année, soit 700 millions de plus que prévu, en administrant 6 doses par flacon au lieu de 5 et en ouvrant une nouvelle usine.

A ces pénuries s'ajoutent parfois d'autres carences. En France, ont parfois été distribuées deux fois moins d'aiguilles de seringues que de doses, rendant impossible une partie des injections.

La question se pose aussi pour les flacons. Mais l'allemand Schott, un des principaux fabricants, a assuré à l'AFP être en mesure de livrer suffisamment de fioles pour 2 milliards de doses cette année.

 

. Le défi du stockage

Le vaccin à ARN messager, innovation médicale utilisée par les deux produits à ce stade autorisés en Europe, doit être conservé à température ultra basse.

Celui de Pfizer/BioNTech nécessite même -70 degrés sur une longue durée. Il peut ensuite être maintenu entre 2 et 8 degrés pendant cinq jours, ce qui laisse peu de marge de manoeuvre et nécessite parfois le recours à la débrouille.

En Bavière, une partie des doses a ainsi été convoyée dans des glacières de camping. Des centaines ont ainsi été perdues les premiers jours, par crainte d'une rupture de la chaîne du froid.

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Le vaccin Pfizer-BioNTech doit être conservé dans un frigo à très basse température, comme ici à Magdebourg en Allemagne orientale. Photo : Ronny Hartmann/AFP

En Bulgarie, la première livraison de doses a été effectuée fin décembre dans des vans frigorifiques d'un fabricant de saucisses, alimentant la méfiance de la population.

L'Espagne n'a pu recevoir de doses fin décembre à cause d'un problème de "température" au sein d'une usine en Belgique.

Comble de malchance en Espagne, d’impressionnantes chutes de neige ont entraîné une interruption des livraisons aériennes à Madrid.

Cette problématique est particulièrement sensible en Inde, qui vise la vaccination d'ici juillet de 300 millions de personnes.

Le respect de la chaîne du froid doit y être garanti par la mobilisation de 29.000 points de stockage à température contrôlée ou encore 41.000 congélateurs.

 

. La bureaucratie

Cette critique est particulièrement vive en France pour expliquer le retard à l'allumage face aux voisins européens.

Un guide de 45 pages a ainsi été envoyé aux professionnels de santé pour accompagner leur démarche dans les maisons de retraite. Les autorités sanitaires avaient aussi mis en place une pré-consultation cinq jours avant la vaccination. Ce délai a depuis été supprimé et le guide réduit à une vingtaine de pages.

Le gouvernement français a aussi fait appel à des cabinets de conseil privés dans un processus où interviennent déjà plusieurs niveaux d'autorités sanitaires, établissements médicaux et para-médicaux ainsi que les institutions locales.

Le lancement de ces campagnes sans précédent en pleine période des Fêtes n'a pas facilité les opérations, notamment en Espagne où des services n'ont pas vacciné ces jours-là, a reconnu l'épidémiologiste en chef du ministère de la Santé.

En France, le feu vert de l'autorité de santé est tombé le 24 décembre.

 

. Le gaspillage

Les vaccinateurs ont rapidement constaté qu'ils pouvaient extraire six doses au lieu de cinq de chaque flacon de vaccin Pfizer/BioNTech. Mais la dose supplémentaire n'étant pas autorisée, il a fallu la jeter. Depuis, les autorités ont modifié la réglementation afin de ne pas gaspiller une seule goutte.

Il y a cependant encore des pertes.

Des hôpitaux new-yorkais ont ainsi jeté des flacons, faute de patients éligibles à la première vague de vaccinations.

"Il y a un manque de directive quant à ce qu'il faut faire avec les doses restantes", a déclaré à l'AFP le Dr Saad Omer, directeur de l'Institut pour la santé mondiale de Yale.

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Congélateurs pour conserver les vaccins à l'Institut Cantacuzene à Bucarest. Photo: Daniel Mihailescu/AFP

Une solution pourrait être de faire une liste de secours au cas où les destinataires ne se présenteraient pas, "comme des billets de dernière minute pour les spectacles de Broadway", a-t-il conseillé.

Aux Etats-Unis, sur les 25,4 millions de premières doses de vaccins Pfizer et Moderna distribuées dans le pays, seules 8,9 millions (35%) avaient été injectées au 11 janvier, dans une campagne qualifiée de "mascarade" par le président élu Joe Biden.

La prise de rendez-vous peut aussi s'avérer chaotique. En Thuringe (Allemagne), le portail d'inscription a été visé par une cyber-attaque, entraînant la perte de plusieurs centaines de demandes de rendez-vous. Dans d'autres pays, les services internet ou téléphoniques ont été saturés.

 

. Le poids du scepticisme

La mouvance "anti-vax" et ses manifestations, parfois violentes, ont incité nombre de gouvernements, en France et en Autriche notamment, à miser sur des procédures lentes.

Le scepticisme est particulièrement vivace en Europe centrale et de l'Est.

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Pourcentage de la population vaccinée dans une sélection de pays européens, au 11 janvier 

La défiance peut même gagner le corps médical. En France, moins de la moitié des médecins se disaient "sûrs" en novembre de se faire vacciner.

En Lettonie, de nombreux employés de l'hôpital de Dunebourg, la deuxième ville du pays, refusent de se faire vacciner.

En Allemagne, la moitié des infirmières ne veulent pas du vaccin, selon un sondage, poussant le dirigeant bavarois Markus Söder à plaider pour une vaccination obligatoire des soignants.

Par Mathieu FOULKES avec les bureaux de l'AFP

 

 

 

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