Berlin - Le gouvernement allemand redouble d'efforts pour empêcher les interdictions de circulation menaçant les vieux diesels en centre-ville, alors que la justice oblige désormais Mayence, après Stuttgart, Francfort et Berlin, à prendre de telles mesures.

"Nous travaillons de toutes nos forces pour atteindre nos deux objectifs: assainir l'air" et "préserver" les automobilistes, a déclaré le 24 octobre à la presse Steffen Seibert, porte-parole de la chancelière, Angela Merkel.

A quelques jours d'élections dans la région de Francfort délicates pour son parti conservateur, Mme Merkel a promis de changer la loi pour "empêcher partout" les interdictions des vieux diesels décrétées par la justice.

Dans un texte prévu le 7 novembre en conseil des ministres, elle veut qualifier ces mesures de "disproportionnées" en cas de dépassement "léger" des normes de pollution, soit entre 40 et 50 microgrammes de dioxyde d'azote par mètre cube.

"Manœuvre électorale" pour les Libéraux, "plaisanterie" pour les Verts, cette annonce a révolté Greenpeace, pour qui Angela Merkel joue "un jeu cynique" qui "aboutira inévitablement devant les tribunaux".

L'initiative laisse aussi perplexes les juristes, puisqu'elle contredit frontalement "la Cour européenne de justice et la Cour administrative fédérale allemande", peu susceptibles de changer d'avis, rappelle Martin Führ, spécialiste de droit de l'environnement, cité par le Frankfurter Allgemeine Zeitung.

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Nombre de décès attribués aux particules fines, dioxyde d'azote et ozone, par pays dans l'Union européenne en 2014 

65 villes concernées

Mercredi, Mayence est venue rejoindre Stuttgart, Francfort et récemment Berlin dans la liste des villes contraintes de bannir les vieux diesel des rues les plus polluées.

La municipalité rhénane a déjà annoncé qu'elle envisageait de faire appel de ce jugement, qui l'oblige à prévoir de telles interdictions à partir de septembre, sauf si elle assainit son air d'ici là.

Mayence figure parmi les 65 villes allemandes qui dépassaient l'an dernier les normes européennes d'émission de dioxyde d'azote, soit 40 microgrammes de NO2 par mètre cube, un gaz associé à des troubles respiratoires et cardiovasculaires, selon l'Office allemand de l'Environnement.

A l'exception de Hambourg, qui a décidé de son propre chef au printemps d'expulser les vieux diesels de deux tronçons du centre-ville, la quasi totalité de la classe politique allemande bataille contre ces interdictions.

Farouchement opposé aux impopulaires "Fahrverbote", le gouvernement s'était jusque là contenté d'explorer d'autres pistes pour réduire la pollution, sans résultats spectaculaires.

L'an dernier, il avait d'abord prôné des adaptations de logiciels des voitures concernées, peu coûteuses, tout en soutenant les initiatives locales pour rendre moins polluants les véhicules municipaux et développer les transports en commun ou le vélo.

Qui va payer ?

Ces mesures se sont avérées insuffisantes, avec une baisse moyenne de 3,7% entre septembre 2017 et septembre 2018 des émissions de NO2 enregistrées par 387 stations urbaines, révélait mardi une étude du Center Automotive Research (CAR) de Duisbourg.

A ce rythme, les villes les plus polluées (au delà de 50 mg de NO2 par mètre cube) ne devraient pas repasser sous les seuils européens avant 2025, calculent les deux experts, Ferdinand Dudenhöffer et Karsten Neuberger.

Même les municipalités accusant des taux de 45 à 49 mg, soit le "dépassement léger" visé par la future loi d'Angela Merkel, ne rentreraient pas dans les clous avant 2022.

Le gouvernement a donc accouché début octobre d'un nouveau "plan diesel", prévoyant cette fois des "primes à l'échange" des voitures anciennes et, surtout, des mises aux normes techniques des véhicules, par exemple en ajoutant un filtre à particules.

Mais le financement reste à préciser puisque les constructeurs allemands, forts des 800.000 emplois qu'ils représentent, n'entendent pas acquitter la totalité de la facture de ces réparations.

Par ailleurs, seules "quelque 2,2 millions" de voitures de norme Euro-5, sur les 5,5 millions en circulation en Allemagne, sont susceptibles d'être rendues moins polluantes, a estimé mercredi le ministère des Transports. Les véhicules plus anciens, de norme Euro 4, ne pourront pas être modifiés.

Par Coralie Febvre

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