Bruxelles - Du "sur mesure" que les Etats membres pourront adapter à la réalité du terrain : la Commission européenne a vanté le 1er juin la possibilité d'une politique agricole commune (PAC) plus décentralisée, en pleine controverse sur les coupes budgétaires envisagées pour après 2020

A la Commission de déterminer de grands objectifs et une liste d'indicateurs pour juger de leur réussite. Et aux Etats membres de choisir parmi ces indicateurs lesquels correspondent le mieux à leurs besoins et aux réalités de leurs territoires.

Parmi les neuf objectifs généraux : "Assurer un revenu équitable", "Rééquilibrer les pouvoirs dans la chaîne alimentaire", "Préserver les paysages et la biodiversité", "Soutenir le renouveau générationnel" ou encore "Protéger la qualité de l'alimentation et de la santé".

Dans le contexte de la baisse attendue du budget de la PAC, le commissaire à l'Agriculture Phil Hogan a dévoilé une "approche plus ciblée pour améliorer l'efficacité et la performance".

Avec la perte de l'importante contribution du Royaume-Uni et la volonté de financer de nouvelles priorités (défense, sécurité intérieure et extérieure, migration), des économies devront être faites.

Politique historique de l'UE, la seule financée à 100%, la PAC va voir son poids diminuer dans le budget total de l'UE : 5% de budget en moins entre 2021 et 2027 par rapport au cadre financier en cours (2014-2020), soit 365 milliards d'euros sur sept ans, selon la proposition de Bruxelles publiée il y a un mois.

Plans stratégiques

L'architecture globale change mais les outils à disposition restent globalement les mêmes. Chaque pays devra désormais définir des plans stratégiques adaptés à ses besoins mais répondant aux exigences générales de la PAC. La Commission aura huit mois pour examiner ces plans et les valider.

Les deux "piliers" de la Politique agricole commune - les aides directes d'un côté, garantie de revenus pour les agriculteurs, et le soutien au développement rural de l'autre  - sont maintenus.

Les principales coupes budgétaires affecteraient le deuxième pilier : plus de 15% de fonds en moins pour tous les Etats membres. Pour les aides directes, elles seront de 3,9% en moyenne et certains Etats membres qui touchent actuellement des aides moins élevées s'en sortiront mieux au titre de la convergence.

Les chiffres sont contestés par plusieurs sources qui reprochent à la Commission de parler en prix courants. La baisse avoisinerait plutôt plus de 10% pour les paiements directs et de 25% pour le développement rural, selon le Parlement européen.

Pour Phil Hogan, le meilleur moyen d'éviter les coupes, en particulier pour le développement rural, c'est que les Etats membres décident de mettre plus d'argent dans le budget de l'UE...

"S'ils ont l'impression que l'agriculture est une priorité importante (...), je serais heureux de voir plus d'argent affluer", a-t-il lancé en conférence de presse.

L'exécutif européen, agacé par la bataille de chiffres, préfère mettre en avant le rééquilibrage qu'elle souhaite opérer, au profit notamment des petites et moyennes exploitations qui recevront plus par hectare de terrain. Et à partir de 60.000 euros, les paiements directs deviendront dégressifs, puis seront plafonnés à 100.000 euros.

Renationalisation ?

Les Etats membres auront aussi la possibilité de transférer jusqu'à 15% de leur enveloppe de la PAC entre les deux piliers.

Mais cette subsidiarité accrue vaut à la Commission des soupçons de vouloir "renationaliser" la PAC, que certains voient déjà "enterrée".

"Le commissaire Phil Hogan poursuit la renationalisation de l'agriculture et enterre la plus importante politique européenne qui n’a plus rien de commune", a déploré l'eurodéputé écologiste José Bové.

S'il se félicite de la dégressivité et du plafonnement ainsi que des soutiens aux jeunes agriculteurs prévus, son collègue socialiste Eric Andrieu accuse l'UE de "renoncer à ses responsabilités en tant que régulateur".

A droite aussi, la critique est cinglante : pour l'eurodéputé Michel Dantin (PPE) "les agriculteurs vont prendre de plein fouet la baisse annoncée du budget agricole : la direction assumée est faire plus avec moins, alors que seule la durabilité économique des exploitations peut permettre des avancées significatives en matière environnementale et climatique".

La Commission européenne assure par ailleurs que la nouvelle PAC sera plus écologique, un "verdissement" de la politique déjà introduit en 2013 mais dont les méthodes décidées alors n'ont, de l'avis général, pas fonctionné.

Elle souhaite mettre en place des "programmes écologiques", sur la base du volontariat, "pour aider les agriculteurs à aller au-delà" de leurs obligations.

Par Marine Laouchez

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