Paris - Pour attirer plus de talents étrangers et répondre aux besoins du marché du travail, la France doit "moderniser et améliorer" son organisation de l'immigration professionnelle, estime l'OCDE dans un rapport s'agaçant de l'opposition entre "migrants économiques" et "réfugiés".

En France l'immigration professionnelle de non-Européens "reste faible" en comparaison internationale: elle représentait en 2016 seulement 16% de l'ensemble des titres de séjour délivrés, rappelle l'OCDE (Organisation pour la coopération et le développement économique) dans son rapport sur "le recrutement des travailleurs immigrés en France" publié le 20 novembre.

On est sur des niveaux deux fois plus bas que l'immigration familiale et "deux à quatre fois moins" élevés que les Européens venant travailler en France, selon l'OCDE, qui rappelle "l'impact positif" sur l'économie que peut avoir "une immigration bien gérée".

"La France devrait moderniser et renforcer le pilotage de l'immigration professionnelle pour attirer les talents étrangers et mieux répondre aux besoins du marché du travail", estime donc le rapport, en prenant plusieurs exemples.

Les sans-papiers tout d'abord: chaque année, plusieurs milliers d'entre eux, travaillant dans la construction ou la restauration notamment, sont régularisés "pour motif économique" (5.000 en 2015, 6.400 en 2016). Dans ces secteurs, les emplois sont perçus comme "peu attractifs", mais il est difficile de recruter des étrangers à cause des procédures administratives.

Pour l'OCDE, il faut améliorer les outils ajustant l'offre et la demande de travail. Il est ainsi "crucial" d'actualiser la liste des métiers "en tension" (qui ne trouvent pas de professionnels pour les assurer), inchangée depuis 2008, et où seuls "15% seraient encore en tension" aujourd'hui.

Le rapport s'inquiète également du "traitement excessivement discrétionnaire" des demandes d'autorisation de travail, aboutissant à une "grande hétérogénéité" selon les régions -- notamment pour l'immigration saisonnière. L'OCDE appelle à "rendre les procédures plus transparentes", à donner "très rapidement" un premier avis aux employeurs, et à affecter assez d'agents à ces tâches.

Usage "fallacieux"

Soulignant le "déficit d'attractivité" de la France auprès des personnes très qualifiées, le rapport estime que le "Passeport Talents" adopté à 2016 pour attirer cette main d'oeuvre va dans le bon sens, même si cela "ne répond pas totalement" au problème.

En effet, le dispositif n'a pas été assez pensé pour les PME, moins informées et manquant de moyens par rapport aux grandes entreprises, selon l'OCDE.

Il faut aussi "s'assurer que le potentiel des étrangers diplômés en France est bien utilisé", ajoute le rapport, qui souligne leurs difficultés d'insertion sur le marché du travail, alors même que "plus d'un tiers" restent en France après leurs études.

Enfin, "il importe de repenser la relation avec les pays d'origine" dans la gestion des migrations de travail, alors que la délivrance de titres de séjour et la coopération "sont plutôt pensés comme des contreparties à la lutte contre l'immigration irrégulière".

En préambule de son rapport, l'OCDE a inséré un rare "avertissement aux lecteurs" s'agaçant d'un débat public où, "en France comme dans d'autres pays de l'OCDE, les +migrants économiques+ sont souvent opposés aux réfugiés" pour désigner "les immigrés entrés illégalement sur le territoire et qui ne sont pas éligibles au droit d'asile".

Or "on ne peut résumer l'immigration à ces catégories caricaturales sans risquer de créer une confusion dans l'opinion publique", avertit l'OCDE .

Ce rappel intervient alors que le gouvernement a plusieurs fois répété sa volonté d'améliorer l'accueil des réfugiés en les distinguant des migrants entrés pour des raisons économiques.

Mais, rappelle l'OCDE, le terme "migration économique" recouvre "l'ensemble des migrants qui disposent d'un titre de séjour (...) délivré en vue de l'exercice d'une activité professionnelle".

C'est pourquoi cet usage est "fallacieux" et "contribue à dévoyer la discussion sur les politiques migratoires", car "il donne à penser que les migrations résultent essentiellement d'entrées irrégulières".

Or "la très grande majorité des migrations" s'effectuent "par le biais de canaux légaux et de manière ordonnée", et avec "d'autres motifs" que la demande d'asile, souligne le rapport.

Par Claire Gallen

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