Paris - En 2015, presque 200 pays s'engageaient à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Six ans après l'Accord de Paris, l'ONU dénonce des promesses toujours pas à la hauteur de l'urgence climatique, notamment chez les grands émetteurs.

L'objectif de l'Accord de Paris est de maintenir le réchauffement "bien en deçà" de +2°C, si possible +1,5°C, par rapport à l'ère pré-industrielle, un plafond qui est de facto devenu l'objectif principal.

La première série des "contributions déterminées au niveau national" (NDC) des signataires plaçait la planète sur une trajectoire entre +3°C et +4°C.

Depuis, il y a eu quelques progrès, mais selon la dernière évaluation de l'ONU qui prend en compte les nouveaux engagements d'une majorité des pays signataires, le monde se dirige toujours vers un réchauffement "catastrophique" de +2,7°C. Ou au mieux +2,2°C si on prend en compte les promesses souvent "vagues" de neutralité carbone pour le milieu du siècle.

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Chine

En 2016, la Chine, responsable de plus d'un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre, s'engageait à réduire son intensité carbone (émissions de CO2 rapportées au PIB) d'entre 60 et 65% d'ici 2030 et à atteindre son pic d'émissions "autour de 2030".

Alors que le pays est sur la trajectoire pour atteindre ce pic avant 2030, le président chinois Xi Jinping a créé la surprise en annonçant en 2020 un objectif de neutralité carbone d'ici 2060.

Mais la Chine, en passe d'augmenter sa production de charbon de 6% face aux pénuries d'électricité, n'a pas déposé sa NDC révisée et les observateurs attendent des précisions pour évaluer les engagements chinois.

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Une centrale électrique au charbon en septembre 2021 à Shanghai, en Chine
AFP/Hector Retamal

 

Etats-Unis

Deuxième émetteur mondial, les Etats-Unis de Barack Obama s'étaient engagés à réduire leurs émissions de 26-28% d'ici 2025, par rapport à 2005.

Après la sortie temporaire du pays de l'Accord de Paris sous Donald Trump, les Etats-Unis y sont revenus début 2021 dès l'arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, avec des engagements renforcés.

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Une centrale électrique au charbon à Adamsville, en Alabama, en avril 2021
AFP/Andrew Caballero-Reynolds

La nouvelle NDC prévoit ainsi une baisse des émissions de 50%–52% d'ici 2030 par rapport à 2005. Un objectif intérieur compatible avec un monde à +2°C,  mais pas +1,5°C, selon le groupe Climate Action tracker (CAT), qui estime que les Américains ne font pas leur juste part au niveau mondial.

 

Union européenne

L'UE s'était engagée en 2015 à réduire ses émissions de CO2 d'au moins 40% d'ici 2030 par rapport à 1990. Objectif relevé en décembre à "au moins 55%" d'ici 2030. En ligne avec un monde à +2°C, selon le CAT.

Le Royaume-Uni sorti de l'UE a lui aussi relevé ses ambitions avec un nouvel objectif de baisse des émissions d'"au moins 68%" d'ici 2030 par rapport à 1990. Un objectif national compatible avec un monde à +1,5°C selon le CAT.

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Inde

Comme la Chine, l'engagement initial de l'Inde est basé sur une réduction de l'intensité carbone: de 33-35% d'ici 2030 par rapport à 2005.

L'Inde n'a pas déposé sa nouvelle NDC ni indiqué quels étaient ses plans.

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La ville de New Delhi, en Inde, un jour de forte pollution en mai 2021
AFP/Arun Sankar

Russie

La Russie, qui a formellement rejoint l'accord de Paris en 2019, a déposé sa première NDC fin 2020.

Elle reprend des engagements précédents de parvenir en 2030 à 70% du niveau des émissions de 1990 (donc une baisse de 30% sur la période). Très insuffisant pour le CAT.

Le président Vladimir Poutine a toutefois depuis promis de renforcer le plan de lutte contre le réchauffement et évoqué un objectif de neutralité carbone pour 2060.

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Le président russe Vladimir Poutine, le 28 octobre 2021 à Moscou
Sputnik/AFP/Evgeny Paulin

Japon

Le Japon s'était engagé en 2016 à réduire ses émissions de 26% d'ici 2030 par rapport à 2013. Sa nouvelle contribution soumise en mars 2020 n'a pas modifié ce chiffre.

Mais le Premier ministre Yoshihide Suga, arrivé au pouvoir après, a renforcé ces engagements. La nouvelle NDC déposée en octobre 2021 fait passer l'objectif à 46% d'ici 2030 par rapport à 2013. En ligne avec un monde à +2°C, selon le CAT.

 

Et le reste du G20 ?

Parmi les autres pays principaux émetteurs, le Brésil, le Mexique, l'Australie, la Corée du Sud et l'Indonésie ont déposé des engagements révisés, mais sans renforcer leur objectif, selon les experts. Les nouvelles NDC du Mexique et du Brésil conduiraient même à une augmentation des émissions, selon un récent rapport de l'ONU.

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Photo de famille des dirigeants participant au G20, le 30 octobre 2021 à Rome
POOL/AFP/Erin Schaff

L'Argentine, l'Afrique du Sud et le Canada ont en revanche renforcé leurs engagements.

L'Arabie Saoudite a déposé le 23 octobre sa nouvelle NDC, qu'elle présente comme un doublement de ses engagements mais qui n'a pas encore été évaluée par les experts.

La Turquie vient d'annoncer sa ratification de l'accord de Paris, ouvrant la voie à la présentation d'une première NDC.

Alors que le G20, dont les dirigeants se retrouvent ce week-end à Rome, représente trois-quarts des émissions mondiales, le rôle de ce groupe de pays est primordial dans l'espoir de garder le réchauffement sous 1,5°C.

 

Neutralité carbone

L'accord de Paris évoque aussi l'objectif d'"équilibre" entre émissions et absorption des gaz à effet de serre "au cours de la deuxième moitié du siècle".

Sous la pression de l'ONU, de plus en plus de pays s'engagent pour cette neutralité carbone, la plupart pour 2050, quelques uns pour 2060 ou 2045.

En excluant les simples promesses, 49 pays représentant 57% des émissions mondiales, dont l'ensemble des membres de l'UE et les Etats-Unis, ont pris cet engagement de façon formelle, selon le dernier rapport du Programme des Nations unies pour l'Environnement.

Dans tous les cas, pour atteindre la neutralité carbone et espérer limiter le réchauffement à +1,5°C, il faut d'abord à court terme des plans cohérents et crédibles pour réduire les émissions de CO2 de 45% d'ici 2030, insiste l'ONU.

Par Amélie Bottollier-Depois

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